Rien à voir.
Quoique.
Je pourrais vous causer de ma très cordiale aversion pour "le Rouge et le Noir" de Stendhal que j’ai pourtant lu en intégralité. Trois fois. Sur trois années consécutives. Je pourrais vous décrire l’espoir qui m’a taraudée à chaque tentative de trouver pourtant dans cet ouvrage quelque raison pour justifier de son statut de classique. Je pourrais me lancer dans une argumentation longue comme un jour sans cigarette pour tenter de vous faire comprendre à quel point ce roman ne m’a pas touchée. Je pourrais… mais je n’en ferai rien. Parce que, comme je l’ai dit… Rien à voir.
Masochisme donc. Je suis là. Devant mon écran en train de rédiger ce billet pour inaugurer cet espace “bloggositoforumien” que Nao m’a très amicalement mis à disposition. Et de façon tout à fait désintéressée qui plus est. Bien entendu. Pensez donc, ce n’est pas comme si la plate-forme était en développement et avait besoin d’être testée, n’est ce pas ?
Oui, masochisme parce que non contente de modérer deux forums, d’être en retard de quinze jours au minimum dans mes réponses aux mails et divers messages privés, de rédiger le prochain chapitre d’une fanfiction ayant atteint à ce jour la taille respectable de 450 000 mots et toujours pas terminée, d’alimenter le blog dédié au susdit pavé, d’apporter ma modeste contribution au fandom par le biais des relectures et corrections dispensées à qui me le demande, d’avoir ouvert (inconsciente !) un Livejournal la semaine dernière… j’ai accepté de participer à cette aventure-là. Aussi.
Et comme je n’ai pas envie qu’on me supprime trop vite ma roue, le cobaye que je suis a donc décidé de se lancer dans la rédaction de son premier article en prenant pour sujet un propos hautement original dont je détiens de fait l’exclusivité, à savoir le dernier livre que j’ai lu.
Pennac. Daniel de son petit nom. “Chagrin d’école”. Je le confesse, il s’agit du premier livre de cet auteur que je lis. Ce n’est pas pourtant pas faute d’avoir été souvent soumise à la tentation par le biais des chaudes recommandations qui m’en ont été faites mais j’ai indûment attendu les dernières fêtes de Noël pour me faire offrir ce livre.
Les prix littéraires, généralement, ce n’est pas franchement mon truc. A l’exception de quelques romans – souvent anciens – les “prix” que j’ai eus sous les yeux ont généralement généré chez moi un ennui mortel en lieu et place d’un enthousiasme débordant.
Pour tout dire, je m’attendais à un “Temps des secrets” bis en voyant le quatrième de couverture et en lisant les divers articles qui ont été consacrés à ce livre. Et en vérité… cela commence effectivement sur la même tonalité. Très pagnolesque quelque part et de fait, pas du tout désagréable. Ca sent la poussière, la colle Cléopâtre, la craie, le vieux bois… un humour fort gouleyant en plus. Je découvre Pennac et son style m’enchante.
Très vite deux axes se détachent néanmoins du livre, à savoir la perception du cancre par l’auteur qui en a lui-même été un et ce qui s’apparente, il faut bien l’avouer, à un essai sur l’enseignement actuellement dispensé dans notre pays. J’avoue être demeurée circonspecte sur le fond de ces deux thématiques.
La première m’a laissé un petit arrière goût de complaisance envers le cancre. L’intention de l’auteur est on ne peut plus louable, c’est évident, et défriche considérablement le terrain sur ce qu’est le cancre et surtout ce qu’il ressent. J’ai d’ailleurs intégré un point de vue que je ne connaissais pas à ce sujet et veux bien croire que cette position n’a rien qui puisse être enviée et recèle un lot de souffrances considérables. Et pourtant… en tant qu’ancienne bonne élève, je ne parviens pas à m’attacher à ce portrait du cancre. Il m’est difficile d’éprouver une empathie totale pour celui du fond de la classe, peut être parce qu’il n’est pas à ce point la victime que l’auteur décrit et se pose en bourreau plus souvent qu’à son tour, peut être aussi parce que le cancre a été de façon quasi systématique pour moi celui qui me pourrissait la vie par des moqueries incessantes et un mépris tenace. Je n’ai pas gardé de souvenir de cancre aimable au sens premier du terme. Aussi, de ce point de vue, l’auteur est bien gentil… Mais ne m’a pas convaincue.
La seconde thématique m’a quelque peu ennuyée. A mon sens, je pense que si les membres de l’éducation nationale ont très certainement retrouvé dans le propos nombre de repères qui leur sont familiers, il n’en est pas de même pour des lecteurs détachés de ce monde-là. Le raisonnement est intéressant, pose des questions quant à l’appréhension que le professeur a de ses élèves dans toute leur diversité et l’évolution de la société, mais lorsqu’on n’y baigne pas, il reste difficile de se forger une opinion tout à fait objective. J’en retire une idée un peu naïve du sacerdoce d’enseignant mais d’un autre côté, il me semble tout de même que l’auteur a aimé passionnément ce métier et y a injecté une formidable énergie constructive. C’est juste que… je n’ai pas l’impression que tous les membres du corps enseignant soient dotés d’une telle abnégation. Dommage d’ailleurs. Si tous présentaient un profil aussi fabuleux, nul doute que l’école serait le lieu où tous iraient en chantant, dans la joie et la bonne humeur.
Bref. Au global, j’ai néanmoins beaucoup aimé ce livre. Pour son style. Son humour. Sa construction. Les quelques notes de recul salvatrices qu’il recèle également. Pennac, je ne connaissais pas… mais je crois dans ma prochaine liste de courses figureront les “Malaucène”. Pour le plaisir de retrouver cet amour de la langue française.